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Le sens de l’affect

Avec ADQUAT, Delphine Bourg et Alexandre Molesin revisitent l’univers du traiteur sur-mesure. À Nousty, ils disposent d’un potager, d’un verger et ont toujours l’envie de proposer des produits locaux de qualité mis en scène pour surprendre les papilles.

Voyage culinaire, du potager à l’assiette.

Ils en ont arpenté des routes avant de trouver le petit chemin de campagne béarnaise où ils ont posé leurs idées, planté leur potager et développé leur concept de traiteur créatif. « Nous avons toujours eu envie de développer un projet commun, mais il fallait faire nos armes, voyager, apprendre, observer… » lance Delphine, la tête organisatrice de ce couple complémentaire et fusionnel depuis dix ans. « Notre envie de voir le monde nous a nourri, dans tous les sens du mot… » ajoute Alexandre, le chef imaginatif d’ADQUAT. Une envie de dévorer le monde et ses richesses − humaines comme gustatives − qui est sans doute le fruit de ses années de compagnonnage, lui l’ancien forgeron, ainsi que des pérégrinations nombreuses de Delphine, ex-organisatrice dans l’événementiel à l’international.

Voyage au centre du goût

Le temps nécessaire pour voir mûrir leur concept, ils prennent leurs sacs à dos, leurs carnets et emmagasinent. Des rencontres, des parfums, des saveurs, des façons de préparer. Au Japon, leur coup de coeur absolu, ils cuisinent pour une geisha, gèrent son ryokan et apprennent l’art culinaire japonais. Dans ce pays codifié et riche, Alexandre rencontre par un de ses hasards qui n’en est pas un l’un des derniers maîtres-couteliers. Il reviendra de l’atelier Sasuké avec une lame gravée à son nom qu’il conserve tel un trésor. En Thaïlande, le couple travaille dans une ferme bio. Alexandre s’occupe du restaurant. « J’allais tous les matins cueillir dans le jardin des produits inconnus chez nous. Une école incroyable ! » se rappelle-t-il souriant. En Mongolie, ils vivent dans une yourte et aident à la traite des chèvres. En Amérique du Sud, ils en prennent plein les yeux et les papilles. Puis ils se posent en version haute gastronomie chez Jehan Colson, ex second de Pascal Barbot, à La Réunion. Sorti major de promotion en CAP et BP cuisine, la route professionnelle d’Alexandre croisera aussi celle de Guy Savoy et d’Alexandre Mazzia, autres grands noms étoilés de la gastronomie.

Un lieu qui leur ressemblent

Les origines familiales d’Alexandre le ramènent dans le Sud-Ouest. « On s’est posé un jour boulevard des Pyrénées avec un café et on s’est dit tous les deux que notre entreprise verrait le jour dans le Béarn. Cela nous a pris une minute pour décider ! » se souvient Delphine. Ce sera à Siros dès 2018, puis à Nousty en 2020. « Il y avait ici le calme que l’on recherchait, l’espace pour développer un vrai potager et un verger, de la forêt, une bâtisse en pierre. On voulait accueillir les gens dans un univers qui nous ressemble. On a fini le labo juste avant le premier mariage que l’on a organisé après le premier confinement » poursuit Delphine. Ce temps suspendu par le Covid est un mal pour un bien qui permet au duo de peaufiner son potager en permaculture, avec un goût prononcé pour les légumes oubliés, les herbes aromatiques rares et les fleurs comestibles. Tout un savoir-faire acquis au fil d’échanges − avec le pépiniériste passionné tout à côté − et de rencontres, une fois de plus. À Menton, où ils font escale au Mirazur pour déguster la cuisine végétale du triple étoilé super star Mauro Colagreco, ils demandent à rencontrer le jardinier. Le feeling passe de suite. Des graines de Nousty sont laissées à Menton tandis que d’autres s’acheminent vers le Béarn. Delphine n’est pas peu fière de montrer les plans du Mirazur. Au-delà de l’anecdote, l’histoire témoigne d’un souhait de partage qui se décline dans les assiettes. « Ce jardin, c’est une source d’inspiration et un havre de décompression » raconte Alexandre. Le duo s’y pose deux minutes le soir, près de la mare aux grenouilles, avant de cueillir, de planter et d’observer encore et encore. Toute une philosophie de la ténacité et du temps qu’ils expliquent avec le sourire. « Dans un jardin, on crée du vivant, alors parfois ça marche, parfois ça marche moins bien quand la grêle ou le mildiou s’invite ; mais la permaculture est un mode d’agriculture raisonné, respectueux, en totale cohérence avec notre concept de traiteur » renchérit Delphine. Si les 17 variétés de tomates n’ont pas toutes les joues rouges, le pécher du grand-père d’Alexandre qui peinait à s’épanouir a visiblement adopté la terre de Nousty. Tout un symbole.

Donner du sens à la technique et créer de la surprise

Pour Delphine et Alexandre, l’organisation d’un événement doit être une fête, avec ses surprises. « On veut offrir du haut de gamme dans la qualité des produits, des préparations, du service, mais sans le guindé » résume Delphine. Alors chaque détail compte. Le choix de producteurs extra locaux, du fromage au miel, de la viande aux fruits, l’éco-responsabilité − vaisselle en verre ou compostable, carafes en verre à l’encre éco-responsable fabriquées à Bordeaux ou arbre replanté via un programme de reforestation pour chaque mariage réalisé. Même les tabliers de l’équipe sont cousus par Chantal, une couturière locale. Tout est pensé avec une sincérité désarmante dont ils tiennent à saupoudrer leurs plats et leurs prestations. Même tonalité du côté de l’équipe, resserrée et fidèle.

« Cette entreprise est une aventure humaine, raconte Delphine, on aime et on assume ce côté artisanal. » Mariages, cocktails, brunchs, apéritif dînatoire, team building, réceptions officielles, leurs prestations se déclinent pour les particuliers et les entreprises. Et le bouche à oreille opère. « Une famille a commencé avec nous par un mariage, puis un baptême, puis une soutenance de thèse ; on en est finalement à neuf événements avec eux, c’est génial ! » s’exclame Delphine. Les plus audacieux laissent carte blanche à Alexandre qui s’épanouit à leurrer visuellement ses clients pour mieux surprendre leur palais. Sucettes de truite fumée, faux esquimau Miko en version salée et pimentée, tube de l’été orange/laurier/framboise, betterave du jardin six cuissons, sauce gourmande à souhait pour son veau de l’Adour… « Aucune sauce ne sort d’ici sans avoir mijoté au moins 15h » précise le chef qui dessine toujours ses plats pour composer des symphonies culinaires aussi visuelles que gourmandes. « J’aime bien reprendre la formule de Guy Savoy sur la “papillothèque” du cuisinier. J’aime l’activer pour associer des saveurs inédites » poursuit Alexandre, intarissable sur son métier pour peu qu’on l’aborde sous l’angle de l’émotion, de la mémoire et de la transmission. Car ce curieux est un chercheur de goûts. Entre deux prestations, il détourne sa machine sous-vide pour créer son eau-verveine, affine ses fonds de sauce, prend un livre sur les herbes et les fleurs pour apprendre, encore et encore.

Cela donne des recettes qui détonnent et étonnent. Le risotto s’arme d’un brebis affiné 18 mois, les oeufs coque revisités se présentent dans des cages à oiseaux… ouvertes, les tubes à essai enchantent les papilles de strates de goût. « C’est mon dada, j’aime qu’il y ait une narration dans le plat, une progression, des goûts superposés, au-delà même des textures » détaille Alexandre. Le petit grain de folie et le dressage poussé à l’extrême pour l’accord beau & bon sont la marque de fabrique de la maison. Delphine et son équipe veillent à la chorégraphie nécessaire, à la déco, mais surtout à l’état d’esprit. « Quand un couple de mariés vient nous voir les larmes aux yeux pour nous remercier, c’est là que mon métier prend tout son sens » ajoute Delphine. Même si parfois les demandes se transforment en challenges de l’impossible. « Un couple avait réussi à privatiser le cirque de Gavarnie. Nous devions rendre la fête exceptionnelle. Mais sans eau et sans électricité sur place, il a fallu monter un groupe électrogène, un évier, créer une cuisine éphémère mais ultra pro. Le résultat était juste magique » se souvient Delphine. « Une autre fois, nous avons eu comme cahier des charges, un buffet gastronomique sans céréales, sans lactose, sans gluten ajoute Alexandre, « j’ai dû chercher et innover, ce fut génial ! ». Le rythme effréné, l’adrénaline, les aléas, la pression, ils prennent tout. Bien décidés à maintenir leur exigence de qualité et de créativité. « On veut transmettre du plaisir, de la joie, du sourire, conclut Delphine,
on veut que nos prestations créent de l’émotion. » Donc une certaine pérennité, celle du souvenir.

Bien produire pour bien manger…

Entre Régis Junqua et ADQUAT, le plateau de fromages a été tout de suite partagé… et terminé ! Il faut dire qu’un même état d’esprit les guide.
De la tradition saupoudrée d’une petite touche d’originalité et d’un savoir-faire respectueux du territoire.

La rencontre entre ADQUAT et Régis Junqua est une drôle d’histoire. Ils avaient entendu parler l’un de l’autre, vaguement, via le cousin d’Alexandre, un ami que Régis avait rencontré à Toulouse durant ses études. L’affaire en était restée là jusqu’à ce qu’Alexandre et Delphine découvrent que Régis avait repris la ferme familiale et l’atelier de fromages… à quelques encablures de Nousty où ils venaient de s’installer ! « En dégustant ses fromages, on a eu le coup de coeur ; on avait déjà un producteur pour nos prestations traiteur, mais impossible de passer à côté des produits de Régis » raconte Delphine Bourg.

“ Je fais des produits de producteur. J’exerce un métier-passion où tout fait sens, de l’alimentation des animaux au respect de la biodiversité du terroir. ”

L’histoire de Régis est celle d’un retour aux sources. Depuis 2017, il a délaissé son costume d’ingénieur biomédical et enfilé les bottes. « J’ai grandi dans cette ferme, mais ma mère m’avait toujours dit de suivre mon chemin, d’aller voir autre chose car le quotidien d’une ferme est difficile. J’ai donc fait mes études d’ingénieur, puis conseillé et installé du matériel technologique médical pendant des années. Un jour, mon oncle, associé de mon père sur l’atelier des fromages, a émis le souhait de passer la main et mon père a commencé à penser à la retraite. Poursuivre leur travail s’est alors imposé à moi » raconte Régis. Sixième génération à exploiter les terres familiales béarnaises, il veille à associer l’expérience ancestrale des bergers et ses connaissances technologiques et chimiques pour amener son fromage à maturité. Et au-delà, pour développer le potentiel de l’exploitation, via la boutique de vente directe à la ferme par exemple et l’embauche de quatre salariés et un apprenti pour le seconder. À la tête de 200 brebis, il ose des créations inédites comme le crottin ou le camembert au lait cru de brebis en plus de la tome traditionnelle. Il élève aussi des canards IGP Sud-Ouest, propose des produits transformés maison et s’est lancé dans le porc noir gascon. « J’ai entamé cette deuxième vie professionnelle comme une évidence » lance-t-il avec le sourire de ceux qui aiment ce qu’ils font et qui ne manquent jamais d’idées. Avec un souci du bien faire et du bien produire qui ne pouvait que séduire le duo d’ADQUAT. « On a la même vision. Je fais des produits de producteur. J’exerce un métier-passion où tout fait sens, de l’alimentation des animaux au respect de la biodiversité du terroir. Delphine et Alexandre ont été sensibles à ce message » poursuit Régis. À ses côtés, son cousin Grégoire, ainsi que Simon et Lauriane oeuvrent à ce message du « bien produire pour bien manger ». Un message bien reçu par Delphine et Alexandre qui n’ont pas résisté au goût des fromages bien faits. « Avec une préférence pour le Titou au lait cru et l’Arriel, deux créations qui surprennent, ce que l’on recherche toujours avec nos partenaires. Les fromages de Régis sont faits avec conviction et respect, c’est essentiel pour nous » conclut le duo d’ADQUAT. Vous reprendrez bien une tranchette de tome de brebis ?

ADQUAT
adquat-traiteur.fr
06 33 70 95 05
10 chemin des Marnières
64420 Nousty

Bergerie du Tilh
06 46 92 03 89
22 route de Nousty
64420 Artigueloutan
www.bergeriedutilh.fr

Vente en direct des produits de la ferme
et des producteurs locaux

Du lundi au samedi
9h – 12h / 14h – 19h
Dimanche 10h – 12h / 14h – 16h

Texte : Nathalie Faure
Photographe : Patrice Martins de Barros