Haut

Dame Gavarnie.

Les éléments donnent au tableau d’altitude si impérial son charisme singulier. Le ciel azurin, étoilé, heureux ou triste reflète ses états d’âmes sur les rochers des sommets enneigés ou verts sapins. Elle a vu le printemps laisser place à l’été. Puis s’en va doucement vers l’automne, qui feuille après feuille, invite l’hiver et la neige. Son cirque époustouflant est sa couronne naturelle. Sa cascade est l’eau qui coule dans ses veines. Dame Gavarnie nous prend dans ses bras majestueux. C’est comme un tout. Elle, le ciel et nous.

Tous ceux qui ont foulé les pieds sur cette terre pyrénéenne s’en souviennent. Le site classé, inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco a inspiré les plus grands comme Victor Hugo qui a posé sur Gavarnie sa plume. Au-dessus de nos têtes, les grands sommets de plus de 3000 mètres en imposent. Le Grand Astazou, le Marboré, le Taillon. Et comme un passage secret à la frontière, la Brèche de Roland. Là-bas, dans ce monde en suspens où la beauté est presque irréelle, la vie s’en donne à coeur joie.

Sensation. Pierre.

« J’en fais une dernière et j’arrive. » Pierre Meyer est accompagnateur en montagne et photographe. « Dans ce site unique au monde, il y a une diversité de paysages incroyable. Ici, j’aime toutes les saisons, la neige, la roche, le ski, la rando… il y a de vrais coins de paradis. » Il connaît cette terre comme la poche de sa combi de ski qu’il quitte rarement l’hiver. Comme son snow qui est un prolongement de lui-même. Ce jour-là, les conditions sont impériales à Gavarnie. Le soleil, la neige fraîchement tombée. « Quand c’est comme ça, je fais le hamster. » Le voilà tourner dans cette grande aire de jeu enneigée jusqu’à ce que l’appel du ventre se fasse ressentir. En bas des pistes, la grande terrasse est plantée face à la scène pyrénéenne blanc pur. La station familiale a tout pour plaire, même les frites maison. Pierre est amoureux et ça se voit. Sa terre de coeur, personne ne lui enlèvera ni aucun souvenir qu’il a partagé avec elle. En hiver et en été, il propose une approche conviviale de la montagne avec les guides d’Acumpanyat. « On fait découvrir les paysages et les joies simples de croiser un isard, une gentiane, un chardon bleu, de voir le vol du gypaète. Et on se pose dans le plus beau cadre qui soit, en échangeant autour d’un verre, d’une tourte ou de quelques grillades. On propose aussi des sorties insolites comme des nocturnes avec casse-croûte dans un igloo. » C’est donc à la belle étoile que les yeux s’émerveillent. Et c’est peu de le dire. Là-bas, on a la plus grande Réserve Internationale de Ciel Étoilé d’Europe Continentale. La nuit est protégée et reconnue comme exceptionnellement pure. Munie de sa coiffe céleste étoilée, Gavarnie est celle de tous. Pour les novices ou plus expérimentés, c’est en toute saison qu’elle fait parler d’elle. Ski de piste, raquettes, ski de fond, tout y est. Et au détour des chemins, sur les falaises, la diversité faunisitique et floristique est grande. Gavarnie détient plus de 200 espèces de plantes endémiques. Ainsi va la vie.

Il connaît cette terre comme la poche de sa combi de ski qu’il quitte rarement l’hiver. Comme son snow qui est un prolongement de lui-même.

Émotion. Marie.

Marie pétille. Derrière ce visage doux et accueillant, on a une grande sportive et toute une famille de grands pyrénéistes qui ont depuis des générations ouvert les voies de Gavarnie. Son arrière-grand-père et guide de montagne Henri Passet réalise avec l’anglais Swan la première du couloir qui sépare les deux Astazous, qui donnera son nom au couloir Swan. Marie raconte son enfance, les chevaux et les ânes de son grand-père, les retours à ski jusqu’au village. « Les ânes et les chevaux à Gavarnie, c’est une tradition qui perdure. Aux beaux jours, on peut se rendre à la cascade à dos d’âne ou de cheval ou en marchant pour ceux qui préfèrent, c’est magnifique. » Mais quand on lui demande quelle saison lui va bien, elle nous avoue que celle du ski est sa petite protégée. Chef des pistes, elle veille chaque jour à la sécurité de la station. « On a une super équipe et une grande relation de confiance entre nous. Ici, on a de très belles conditions d’enneigement et des pistes très sécurisées, notamment au niveau des croisements, c’est une chance. » Marie connaît la neige, elle qui est du métier depuis 20 ans et a vu ses premiers flocons depuis son berceau. La station de Gavarnie possède la plus grande piste verte des Pyrénées qui s’étend sur 6 km depuis le point le plus haut des pistes. Là où la vue est imprenable. Et Marie, après toutes ces années, se lève le matin et reste fascinée par le tableau. Elle monte tous les matins là où elle sait qu’elle rencontrera les isards et sans un bruit les observe. « C’est extraordinaire. Quand tu es d’ici, tu as du mal à partir…»

Son arrière-grand-père et guide de montagne Henri Passet réalise avec l’anglais Swan la première du couloir qui sépare les deux Astazous, qui donnera son nom au couloir Swan.

Élévation. Christophe.

« On vole comme on est ». Lui est né pour voler. Suspendus à ses lèvres et aux sièges tissés de cordes blanches dans son salon, nous écoutons Christophe, l’arrière-petit-fils de Célestin Passet, le cousin d’Henri Passet. « Il montait sans les pompes, il a ouvert les voies pour arriver au Cirque. » Trois générations plus tard et avec beaucoup d’admiration pour les anciens, l’enfant aux ailes déployées contemple le chemin tracé par son arrière-grand-père vu du ciel, sous la cathédrale de son parapente.

 

 

« Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,

Par delà le soleil, par delà les éthers,

Par delà les confins des sphères étoilées,

Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse

S’élancer vers les champs lumineux et sereins ;

Celui dont les pensers, comme des alouettes,

Vers les cieux le matin prennent un libre essor,

Qui plane sur la vie, et comprend sans effort

Le langage des fleurs et des choses muettes. »

 

 

Baudelaire a sans doute soufflé ces quelques vers dans son berceau. Pour lui, « tout est énergie et vibration ». Son âme libre le guide vers ces hauteurs portées par le vent. Christophe se rappelle de son premier vol seul où il s’est posé après trois heures à flirter avec les nuages. « C’était chez moi, à côté de la grange, c’est là que j’ai fait voler mes premiers avions de papier. Mon plus beau site d’émotions, c’est Gavarnie. » Il en a pourtant connu des montagnes à travers le monde, côtoyant

le ciel et les couleurs d’autres pays, mais son coeur le ramène ici. Sur terre, il gère son gîte « Oxygène » qui est ouvert toute l’année, l’hiver en gestion libre et de mai à septembre en demi-pension. Il concocte des produits locaux comme la truite d’Argelès-Gazost, le porc noir de la région.

Mise en scène. Le Festival de Gavarnie.

Depuis 35 ans et chaque année devant plus de 12000 spectateurs, une nouvelle histoire, une nouvelle oeuvre universelle. Le Festival de Gavarnie pose ses artistes et sa scène au coeur du Cirque pendant deux semaines à la saison d’été. La toile de fond est grandiose, vivante, saisissante. Le lieu extraordinaire et les talents donnent au spectacle son spectaculaire.

Cette année 2020 aurait dû accueillir « Alice, de l’autre côté des merveilles » mis en scène par Céline Texier-Chollet. Mais c’est 2021 qui l’invitera. « Il y aura d’autres paroles et d’autres actes à mettre dans Alice, qui devront résonner avec ce monde instable, dont personne ne maîtrise encore les mouvements » écrit Céline dans une lettre adressée à tous. Céline est douce et empreinte d’une philosophie remarquable à la première rencontre. L’oeuvre de Lewis Caroll est une oeuvre de coeur pour elle. Si sa deuxième fille s’appelle Alice, il y a ce petit quelque chose entre le roman écrit en 1865 et la jeune maman. « À travers Alice, il y a des messages à faire passer. L’écriture que j’en fais est extrêmement personnelle mais qu’est-ce qui va faire que mon histoire parle aux autres ? Je ne veux pas être là où l’on m’attend. Le chapelier aura-t-il un chapeau ? » Avec son équipe de 10 comédiens avec qui elle a choisi de jouer l’histoire, ils font, défont, rient, s’interrogent, échangent dans une même énergie de création. « C’est très prenant, j’essaie de les amener à ce que je veux voir d’Alice et qu’ils adhèrent à cette écriture avec moi. » Alice est à Céline ce que l’interprétation contemporaine est à une artiste. Quelle est notre partie de rêve, de cauchemars, de conscient et d’inconscient, notre part d’enfance, d’adultes. L’image que nous renvoyons est-elle celle de ce que nous sommes vraiment ? Au pied des sommets, la scène circulaire que Céline imagine est comme l’immersion complète dans la tête de quelqu’un. « C’est comme ça l’esprit humain, il y a des soirs où l’on voit les étoiles et des soirs où on ne les voit pas. Parfois la lune est pleine, parfois non. Il y a des cascades, des falaises, des chemins… » C’est une représentation de notre nous, notre tout, à travers Alice qui promet d’être unique et n’oublions pas, de l’autre côté des merveilles.

Dans l’équipe de Céline, on a le personnage fou, le loir, par Bruno Spiesser. Bruno est directeur artistique du Théâtre Fébus, compagnie qui a repris le Festival en 2007. Il a vu durant toutes ces années le théâtre et la montagne s’apprivoiser à Gavarnie, il a connu les débuts du Festival en tant que comédien. « Dans ce décor magnifique, on apporte notre empreinte, on se fond avec Gavarnie avec une approche différente chaque année. On joue des éléments. » Les étoiles et la lune, le vent, la sonorité, la lumière du soir, les nuages qui volent au-dessus de cette salle de spectacle à ciel ouvert font partie de la scène. « Le rapport de l’homme à la nature prend ici une autre dimension. Au sens technique, il y a un vrai travail de lumière qui est tout à fait différent d’une salle de spectacle classique. Le son aussi, nos voix sont portées plus forts, nos gestes plus larges. » L’homme et la nature. Quand les deux ne font qu’un dans un respect mutuel, cela promet d’être grandiose.

Dame Gavarnie aux multiples visages, aux couleurs éphémères. Habillée de blanc, en robe d’été fleurie, salle de spectacle grandeur nature, elle révèle ses merveilles. Dame Gavarnie est intemporelle. Ses enfants Christophe, Marie, Pierre, et les artistes qui projettent sa lumière gardent un oeil sur elle. En glissant, en volant, en marchant, en jouant, c’est en toute saison que la vie va, vient, devient. Comme les fleurs et la neige dans ce grand jardin.

DAME GAVARNIE EN ÉTÉ

Les randonnées

Cirque de Gavarnie
Coeur emblématique du Parc National des Pyrénées, il s’étend sur 6,5 km de circonférence, avec des sommets dépassant les 3000 mètres. Comptez 1h à pied ou à cheval pour l’atteindre depuis le village de Gavarnie.

La Brèche de Roland
Rejoignez ce symbole taillé dans la frange au sommet du Cirque. Pour rejoindre le passage frontalier le plus emblématique des Pyrénées, comptez 5h30 A/R pour des randonneurs confirmés et admirez l’immensité et la beauté du Cirque.

POUR D’AUTRES IDÉES RANDO
www.rando.valleesdegavarnie.com

Découvertes

La centrale hydroélectrique
Mise en service en 1954 et située à Pragnères, près de Gavarnie-Gèdre, la centrale hydroélectrique est à visiter pour petits et grands pour comprendre la production d’une énergie renouvelable avec l’eau des Pyrénées sur 40 km de galeries et 4 barrages. Les visites se font de juin à septembre et pendant les vacances scolaires le reste de l’année (hors vacances Toussaint). Groupes : visites toute l’année.

DAME GAVARNIE EN HIVER

Le domaine

Ski alpin
29 pistes, 40 km (7 vertes, 9 bleues, 8 rouges et 5 noires)
1 piste de luge
Circuits nordique et raquettes en accès libre
Tarifs
29 € / adulte 24,5 €/ enfant 23 € / tarif unique hors vacances

Les Plus
1 piste de luge gratuite en pied de piste.
Au pied du Cirque de Gavarnie : 1 piste de ski de fond (7,5 km), 1 piste raquettes (6 km). Accès gratuit.
3 parcours de ski de randonnée balisés
6 parcours raquettes balisées dans la vallée, plan disponible dans les Bureaux d’informations touristiques de Gèdre et Gavarnie.

PLUS D’INFOS SUR
www.skigavarnie.com

En 2021, la station fête ses 50 ans ! Elle promet de gâter ses visiteurs qui découvriront bien des surprises.

Gavarnie-Gèdre

www.valleesdegavarnie.com

05 62 97 00 25
Argelès-Gazost
Terrasse Jacques Chancel
15 pl. de la République
65400 Argelès-Gazost

Patrimoine Mondial de l’UNESCO, Grand Site Occitanie, coeur emblématique du Parc national des Pyrénées.

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Texte : Marlène Gassie
Photographe : Jean-Michel Ducasse